Aller au contenu

Les conférences du SLAM : petite histoire du livre à travers cinq siècles d’imprimerie

Cette présentation a été divisée en deux parties. La première partie traitait du livre en tant qu’objet, résultat de procédés techniques de fabrication qui ont permis la mise au point de la forme (passage du rouleau au volume), du support (passage du papyrus au parchemin, puis au papier), enfin de l’impression, en blocs xylographiques d’abord, en caractères mobiles ensuite.

Le rappel de l’existence d’imprimés xylographiques en Extrême Orient dès le VIIIème siècle (et en caractères mobiles dès le XIVème siècle) précédait la description des premiers essais signalés en Europe, par deux orfèvres, Gutenberg à Strasbourg et Waldvogel à Avignon, puis l’apparition du premier grand livre imprimé, la Bible de Mayence à 42 lignes, le chef - d’œuvre de Gutenberg.

Cette invention était diffusée dans toute l’Europe en quelques décennies, souvent au début, à Paris par exemple, par des ouvriers allemands : le livre, jusque là produit de luxe, devenait un objet de consommation beaucoup plus courante, sur un marché qui, grâce à l’utilisation de la langue latine par tous les milieux cultivés, était d’emblée international. Mais à la rapidité de cette diffusion initiale, concernant aussi bien, en occident, les impressions en caractères latins que celles en caractères orientaux, s’oppose le peu de progrès enregistrés pendant les trois siècles suivants. En dehors de la création de nouvelles polices par des imprimeurs souvent éponymes, l’italique des Alde, l’elzévir, le didot, le bodoni …, les premières avancées majeures ne sont constatées qu’à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle, avec l’impression polychrome pour les illustrations et la première presse métallique mise au point par Stanhope à la fin du même siècle.

C’est aux XIXème et XXème siècles que les progrès vont s’accélérer, sur le plan strictement technique avec la linotypie, qui permet de composer non plus lettre par lettre mais ligne par ligne, sur le plan de la diffusion avec, pour concurrencer les contrefaçons belges, l’apparition des collections à bon marché de Gustave Charpentier et de Michel Lévy. Produit de consommation courante depuis la Renaissance, le livre devient ainsi un produit de consommation de masse dont la fabrication va être de plus en plus industrialisée. Grâce aux techniques modernes (plaques d’impression, puis photocomposition, puis PAO – publication assistée par ordinateur), grâce à des machines de plus en plus importantes, des tirages de centaines de milliers, voire de millions d’exemplaires deviennent possibles : on est loin des quelques centaines – au mieux quelques milliers d’exemplaires - des tirages des incunables (nom donné aux livres imprimés avant le premier janvier 1501).

Pour terminer cette première partie, quelques minutes ont été consacrées aux modifications apportées par l’imprimerie à la structure du livre, et en particulier à l’apparition, en quelques décennies, de la page de titre telle que nous la connaissons aujourd’hui, avec le nom de l’auteur, le titre de l’ouvrage, le nom et l’adresse de l’éditeur et, éventuellement, la devise illustrée de celui–ci.

La seconde partie de la présentation proposait une réinsertion de l’objet livre dans le milieu social qui l’avait vu naître et qui l’a ensuite accompagné tout au long de son évolution, en commençant par souligner la non – individualisation, fréquente jusqu’au XIXème siècle, de trois fonctions aujourd’hui distinctes, l’éditeur qui finance la fabrication du livre, l’imprimeur qui le fabrique et le libraire qui le diffuse.

A partir de biographies et de pérégrinations individuelles ou familiales (les Estienne, français et chrétiens, de Paris à Genève ; les Soncino, italiens d’origine allemande et juifs, du Milanais à Salonique et à Istamboul ; les Hovius de Belgique en Bretagne ; les Didot à Paris) se dessinait le lien très puissant entre d’une part l’essor du livre imprimé et d’autre part à la fois l’esprit d’ouverture de la Renaissance et les conséquences de la Réforme et de la Contre - Réforme.L’intervention des censures (royales, ecclésiales, protestantes …), les bûchers où l’on brûlait non seulement les livres mais aussi les libraires (Etienne Dolet), puis l’autorité tatillonne d’une corporation très surveillée par la police venaient limiter l’essor initial de la diffusion culturelle et, peut – être, expliquer en partie l’absence d’inventions majeures pendant plusieurs siècles. Au XIXème siècle, cependant, malgré le rétablissement, après l’intermède de liberté révolutionnaire, de la censure par Napoléon, ni celle – ci, ni les procès intentés aux écrivains et à leurs éditeurs (Paul - Louis Courier, Baudelaire …) ne pouvaient plus empêcher, parallèlement au progrès technique, la diffusion des idées modernes grâce au livre imprimé.

Après avoir signalé d’une part les cas de quelques écrivainsimprimeurs, Benjamin Franklin aux Etats-Unis, Rétif de la Bretonne et Balzac en France, d’autre part l’installation par quelques grands seigneurs (Agrippa d’Aubigné, le duc de Choiseul, le prince de Ligne …) d’imprimeries particulières dans leurs châteaux, enfin le développement au fil de ces cinq siècles des collectionneurs de livres (les « bibliophiles », terme qui recouvre une infinie variété de rapports personnels au livre), Elie Szapiro terminait son exposé par une revue et une brève histoire des lieux où sont conservés et visibles aujourd’hui, témoins irremplaçables de notre culture, les livres imprimés : les musées de l’imprimerie (Lyon et Nantes en France), les bibliothèques, les librairies spécialisées en livres anciens, et last but not least, le Salon annuel du Livre Ancien au Grand Palais – le prochain aura lieu du 19 au 21 juin 2009.

Une bibliographie sommaire des sujets abordés pendant cette conférence peut vous être adressée sur simple demande faite à l’auteur Elie Szapiro galerie-saphir@wanadoo.fr